d'un café du Borne, autour de lui se formait un nombreux cercle d'audit
lle[C]. Au temps où je commandais le ?Roger de Lauria?, je m'étais arrêté un jour à Alger devant la porte de la synagogue; un vieillard, a
lateria, ou rue des Orfèvres, hab
romenait ses regards de tous c?tés, comme pour défier les gens, les maisons, l'ame
ien marin; mais son profil était nettement sémite; il avait le nez fort et recourbé, le menton proéminent, et des yeux
poussait à braver les préjugés traditionnels. Les autres chuetas, terrorisés par plusieurs siècles de persécution et de mépris, cachaient leur origine, ou cherchaient à la faire oublier à for
ts que vous vénérez sur vos autels. Les butifarras parlent avec orgueil de leurs a?eux, mais leur noblesse ne
éjugés acharnés contre sa
puisse se glorifier de son origine. Nous sommes presque tous
et, un instant après,
ont petits-fi
convertis en masse, et les rebelles avaient été br?lés par l'Inquisition. Les chuetas de maintenant étaient les plus fervents catholiques de Majorque, apportant dans leur religion nouvelle un fanatisme tout sémite. Ils priaient à haute voix, faisaient entrer leurs fils dans les ordres, recherchaient des protect
mes toujours les maudits, les réprouvés, comme avant la conversion. N'est-ce pas amusant?... Les chuetas! dit
ent s'être concentrés les souvenirs de toutes
'ils se sont faits chrétiens. S'ils étaient restés juifs et s'étaient dispersés dans le monde, comme tant d'autres, ils seraient peut-être à l'heure
ertis, les catholiques, les musulmans qu'il avait connus au cours de ses voyages sur les c?tes d'Afrique ou aux échelles du Levant.
e à qui prêter de l'argent: mais nous seuls avons donné aux hommes des pasteurs qui resteront leurs ma?tres dans les siècles des siècles. Mo?se, Jésus et Mahomet sont de chez nous. Un fameux triumvirat, n'est-ce pas, messieurs?... Et récem
quand les haines confessionnelles s'étaient éveillées, les juifs les plus riches et les plus rusés avaient su se convertir à temps, spontanément, s'étaient fondus avec les familles catholiques du pays, et avaient fait ainsi oublier leur origine. C'étaient ces nouveaux catholiques qui, avec la ferveur des néophytes, avaient attiré la persécution contre leurs anciens frères. Les chuetas d'à présent, les seuls Majorquins d'origine juive connue, étaient les descendants des derniers convert
s les gentilshommes; après eux les mossons, c'est-à-dire les gens exer?ant des professions libérales; puis les marchands et les ouvriers; puis encore, les paysans, cultivateurs du sol. Venaient ensuite, par ordre d
aires, magistrats, financiers, constataient, dès leur retour à Majorque, que le dernier des mendiants les dédaignait, et, pour peu qu'il cr?t avoir à s'en plaind
à voix haute dans leurs maisons, pour que dans la rue nul ne l'ignorat, et en outre faisaient leur cuisine à la fenêtre, pour montrer à tous qu'ils mangeaient du porc. La haine traditionnelle n'était pas vaincue. Les fils de chuetas qui voulaient se faire prêtres, ne trouvaient pas de place dans
ns leur famille, et sont même plus catholiques que les autres... mais ce sont des chuetas! Il faut bien qu'ils aient
ient de bonne foi que les chuetas étaient couverts de crasse et avaient une queue comme la diable
Benito, qui prie tout haut, et à force de baise
t le jour, mais passer la nuit dans sa maison! impossible! Jamais, de mémoire d'homme, un chueta n'avait dormi dans le village. Don Benito ne prêta pas d'attention à ces avis, et voulut passer une nuit dans sa propriété; mais à peine se mit-il au lit que tous les habitants de la maison s'enfuirent. Quand il fut fatigué de dormir, il sauta à bas du lit. Obscurité complète. Il croyait avoir dormi douze heures au moins, et il faisait en
outait le capitaine. Mon frère!...
urs absent, tant?t sur mer, tant?t dans de lointaines contrées, il menait une vie de joyeux célibataire: ce qu'il gagnait lui suffisait. Aussi, à la mort de leur père,
sait-il d'ajouter. Dans la question d'héritage, il n'y a ni
ours par une attaque du quartier juif où les combattants se réconciliaient en massacrant ceux qui n'avaient pas fui et en pillant leurs boutiques. Si, en cas de guerre, un bataillon majorquin recevait l'ordre de partir pour l'Espagne, les soldats se mutinaient, quittaient leur caserne, et mettaient à sac la Calle. Quand les ré
ont le nez et les yeux faits comme les miens; mais on y voit aussi des camards, qui n'ont rien du type géné
s noms, c'était seulement le caprice de la tradition qui les distinguait les uns des autres. Seuls, les descendants de ceux qui furent fouettés ou br?lé
s a?eux furent rissolés sur les b?chers, et les petits
lein Borne les suspects de Juda?sme. Parmi les chuetas, certains furent br?lés, d'autres fouettés, quelques-uns simplement condamnés à la honte de porter un chaperon, où étaient peints des diables, et de tenir à la main un cierge de cire verte. Mais tous, indistinctement, virent leurs biens confisqués, au profit du Saint-Office qui s'enrichit ainsi. Depuis lors, les suspects, au moins ceux d'entre eux qui ne
voir vu prendre fin; les fils devenaient des hommes, et, à leur tour,
ans un verger, voisin des remparts, sous la direction d'un certain Rafael Valls, homme
aine. Plus de deux siècles se sont écoulés depuis; mais s'il n'a pas été mon anc
s les livres où étaient racontées les persécutions,
iscation de leurs biens produisit un million de douros. Or, comme le Saint-Office avait déjà dans ses coffres plusieurs autres millions arrachés aux victimes des persécutions précédentes, il fit batir à Palma le plus somptueux palais qu'ait jamais possédé l'Inquisition. On tortura les prisonniers jusqu'à ce qu'ils eussent fait les aveux que leurs juges voulaient obtenir, et le 7 mars 1691,
ié en parchemin, dont il caressait, avec une
es messes solennelles auxquelles assistaient trente-huit criminels condamnés au b?cher; des riches costumes des gentilshommes et des alguazils; des cavaliers montés sur des chevaux fringants qui précédaient la pro
e la même trempe. Les prêtres marchaient, pleins de vaillance, exhortant à grands cris les coupables, infatigablement. Le
anais, de passage à Majorque avec sa flotte, s'apitoya sur la beauté et la jeunesse d'une pauvre jeune fille condamnée à être br?l
ueil démesuré, le poussant à maudire ceux qui l'avaient condamné à mort et à refuser de se réconcilier avec l'église. Tout fut inutile; mais,
it un héros! Vous allez voir maintenant avec quelle
il se défendit, se déroba, se débattit de toutes ses forces, jusqu'à n'en pouvoir plus. Il était gras comme un cochon de lait, et il prit feu à l'intérieur, si bien qu'avant que les flammes l'eusse
vage récit produisai
que le capitaine promenait ses regards de tous c?tés d'un
armi ses auditeurs, Valls
la bannière verte, comme alferez major du Saint-Office; et les belles dames de
par ce souvenir,
les choses de ce temps-là? Seuls, quelques fous comme toi. Allo
aine gro
ce temps-là. Les haines de religion et de race persistent. Ce n'est pas
tous ceux qui ont roulé dans le monde, ne savait pa
ues. L'unique différence entre eux était que Valls, avec l'activité de sa race, avait toujours su gagner de l'argent, et qu'à ce moment-là, quoiqu'il e?t seulement dix ans de plus que Jaime, il avait des rev
ité que lorsque Valls évoquait ses amours de jeunesse, alors qu'il commandait les bateaux de son père, au temps où il avait connu des femme
à Jaffa, tu sais, quand les
it un bon gar?on, digne d'un meilleur sort. Il ne lui trouvait qu'un défaut,
à son cocher de retourner à Palma, il rejeta en arrière le feutre mou qu'il portait en toute saiso
? mais je sais tout. On m'a mis au courant, et puisqu'i
rent franchi la grille du jardin, ils virent venir à eux un homme agé, aux favoris blancs, qui s'appuyait sur une canne. C'était don Benito Valls. Il souhaita la bienvenue à Febrer d'une
e avec un malicieux sourire. Je ne suis
is on lisait dans ses yeux de l'inquiétude. Son frère lui inspirait une certai
pris que Jaime devait déjeuner ici, je me suis invité, s?r
s étaient modernes et vulgaires. Aux murs pendaient des chromos et d'a
s de poudre de riz, saupoudrant son corsage, révélaient l'empressement avec leq
ile, avec des contours fermes et pleins, présage de l'embonpoint propre aux femmes de sa race. Elle semblait avoir un caractère doux et soumis. C'était bien la bonne compagne, incapable d'être jamais gênante dans le voyage à deux qu'est la vie commune. Elle
enant cet air jovial de vieux viveur qu'il avait en parlant aux filles de
i, on avait conservé les anciens usages; on déjeunait à midi précis. Les convives se mirent à table,
inissaient pas, tant il balbutiait et faisait de longues pauses, pendant lesquelles il demeurait sans souffle, les yeux révulsés, comme s'il allait mourir asphyxié. Une atmosphère d'inquiétude
la péniblement le malade. A Valldemosa... je
une voix de petite religieuse timide, qui c
papa se po
mon frère, ajouta le capitain
. Heureusement qu'il n'en avait pas pour longtemps. Ce ne serait qu'un ennui de quelqu
arlait à Jaime des illustres Febrer, ses anc
e grand ami de monsieur vot
t le respect aux gens, sans les froisser. Mais de là, à être son ami!... Peut-être Benito Valls avait-il été en rapport avec don Hora
lence de Febrer. Je fis campagne pour lui, quand il fut élu député. Ah! cela date de loi
. Aujourd'hui son frère était membr
aime les vieilles coutumes... je veux voir commander ceux qui ont quelque chos
enthousiasme l'étouffait. Il levait au ciel ses yeux de moribond, adorant av
en s'adressant à Febrer; vous le connaissez; une mauvaise tête, un républicain, un hom
avoir! pour que
triste, comme si elle craignait de voir se reproduire devant Febrer, les scènes b
r d'or, mais une tête à l'envers! C'était à cause de ses idées exaltées et de ses vociférations dans les café
quées de gestes timides, évitant de prononcer
à son humeur agressive, voulait faire oublier ses pa
ue fois que Pablo d?nait chez eux, el
rin avec un certain orgueil. Oui, j'ai souffert de la faim,
voyant en lui que le fils de l'armateur. Jamais, dans ces conditions, il ne serait devenu un bon marin, endurci et expérimenté. Avec l'énergie tenace de sa race, il s'était embarqué, à l'insu de son père, sur un trois-mats qui faisait voile vers les ?les Chinchas, pour y charger du guano. L'équipage était composé d'individus de divers pays: anglais déserteurs de la flotte, bateliers de Valparaiso, indiens du Pérou, tout ce qu'il y avait de pire. Ils étaient commandés par un Cata
iers, je pris soin, en jeune homme de bonne maison, d'enlever une à une ces petites bêtes; mais, après cett
nt ce qui allait suivre et repoussant ass
rai que je les mangeai la nuit... Ah! si j'avais pu en avoir beaucoup, ma petite! A la fin, on ne nous en distri
le d'accompagner le se?or Febrer, pour lui montrer des rosiers exotiques qu'il avait plantés. Les deux frères demeurèrent dans la pièce qui serva
moins riches qu'elle, qui profitaient de toutes les occasions pour la taquiner, poussées par la jalousie et par la haine que leur avaient inculquées leurs parents. Elle était la chueta! Elle n'avait d'amies que parmi les petites filles de sa race, et encore celles-ci, désireuses de se mettre bien avec l'ennemi, se trahissaient mutuellement, sans énergie ni esprit de solidarité pour la défense commune. A l'heure de l
compagnes l'avaient suivie hors du pensionnat, remplissant d'amertume tous ses plaisirs de jeune fille riche. A quoi bon être élégante?... Sur les promenades, elle n'était saluée que par les a
résentait ainsi qu'un prince de conte de fées. Que la bonté de Dieu est grande! Elle se voyait dans ce palais, voisin de la cathédrale, dans le quartier des nobles aux rues étroites et silencieuses, pavées de pierres bleuatres, où passaient, aux heures somnolentes de l'après-midi, des chanoines appelés par la cloche du ch?ur. Elle se voyait, se promenant dans une luxu
ndis qu'elle pensait à l'avenir, s'ouvrant devant elle, avec l'éclat d'un lever de soleil qui perce les nuages. Elle entendait Febrer pa
vivre éternellement dans cette ?le. Je n'ai jamais fait de mal à personne, et pourt
ion que lui présentai
pour lui parler. Il lui offrait une vie nouvelle... Toutes ces belles choses qui l'émerv
ps sans répondre, et enfin balbutia quelques mots. Elle était heureuse assurément, plus qu'elle ne l'a
vraiment!... c'est
De quel droit ce facheux se mêlait-il de ses affaires? Mais la présence de don Benito le fit taire. Le père de Catalina, le visage congestionné, grognait, tout haletant. Le capitaine allait et venait, avec une nervosité ho
ime et la serra fortement. Febrer pouvait considérer cette maison comme la sienne; il avait là un ami v
relations d'amitié; puis il invita Jaime à déjeuner avec eux le
dit-il, en jetant sur Catalin
rière laquelle le père et la fille agitaient encore leurs mains en
x que je devienne ton oncle
i et du rude sans-gêne avec lequel il lui avait fait quitt
t-il? De quel droit se m
au de mousquetaire, rejeté en arrière. Tout beau, mon galant! Je me mêle de ?a, parce que j
-tu à dire? Il se peut que Catalina acc
oncle, et son oncle proteste et so
garda avec
rer? Pablo espérait mieux
e? Tu peux être mon ami, l'ami du chueta Pablo Valls, que tu rencontres au café, au cercle, et qu'a
plus indulgents, s'il commettait un assassinat. Sa tante, la papesse Juana, jetterait les hauts cris, comme si elle venait de voir un sacri
te le répète; moi, son
le capitaine d'
vaut mieux ne plus parler de cel
Arrivés au Borne, ils se séparèrent en se
é sur une table de l'antichambre une petite lampe dont la lumière
do Antonia parlait avec sympathie de ces gens qui lui semblaient venir du bout du monde... La bonne Mado n'exprimait que la moitié de ses pensées; et, pendant qu'elle suivait Jaime jusqu'à la chambre à coucher, elle l'examinait à la dérobée, essayant de lire sur son visage. Que s'é
à coucher, il changea de vêtements, puis ayant pris des mains de
c quel flegme il tirait de ses poches des poignées de billets de banque. Originaire d'un village de l'intérieur, il était arrivé, à force d'énergie et de courage, à devenir le chef d'un état mystérieux que tout le monde connaissait par ou?-dire, mais dont la secrète organisation demeurait dans l'ombre. Il avait des centaines de sujets capables de donner leur vie pour lui, et une flotte invisible qui naviguait la nuit, sans crainte des tempêtes, abordant aux points les moins access
mbarcation, avec quelques ballots de tabac pour toute cargaison, afin que les agents du fisc pussent faire parade de ce triomphe. Lorsqu'une épidémie sévissait dans les ports africains, les autorités de l'?le, impuissantes
ciers, demandant des conseils à la finesse de ce paysan madré. Lui, Febrer, qui n'e?t jamais rien voulu emprunter à ses amis d
is se serrè
as été à
ant les plus insignifiantes nouvelles circu
e langage, autre chose qui me para?t être un mensonge. O
tait bien vrai. Et il ne voulait
andis que ses yeux, pourtant accoutumés à tout
l, Jaime; t
me si une question d'une impo
confiance à cet ami-là qu'il n'e?
st encore chez moi ne m'appartient. Si mes créanciers me respecte
ion. Lui, le rude paysan, le contrebandier qui se moq
faire comme tu pourras, mais pas ainsi... Nous, tes a
rrant vigoureusement la main, comm
en, dit-il sur un ton de re